Un norvégien au pays de Montesquieu, de la loi au contrat

A Ludovia août 2010 (Ax les thermes en Ariège) la Norvège était le pays invité. L’école Arkadamiet était présentée par son créateur. Une présentation séduisante d’un modèle qui semble favoriser la réussite des élèves en s’appuyant sur l’introduction des nouvelles technologies.

Un système aussi idyllique qu’il le paraît ? Pédagogie ou business ? Et s’il fallait plutôt aller voir du côté d’Orestad ?

 


Je commencerais ce billet en citant un article de Mario Asselin (@MarioAsselin) intitulé « La brigade de blogueurs teinte l’événement Ludovia » :

  "À peu près personne dans la salle pour les écouter à part des gens préoccupés à relayer de l’information et des points de vue. Dans le cas de la Norvège, je ne sais pas si on sera plusieurs à effectivement retransmettre le contenu des présentations, mais au moins, sur place, on pouvait «sauver la face»… Je blague à peine.

Je vais donc parler de la Norvège est plus particulièrement de l’exemple de l’école Akadamiet. Je cite à nouveau Mario " Personne n’est dupe: les blogueurs ne rapportent pas des points de vue neutres" . Ce billet ne sera pas neutre effectivement :-) . Arkadamiet est une marque qui restera marquée dans mon esprit parce qu’elle est l’exemple de ce qui m’horripile, le savoir marchandisé. dans toute sa splendeur.

Bien sûr la présentation était séduisante, une école où l’on intègre le numérique de façon très pertinente.

Un ENT conçu en référence aux pratiques actuelles c’est-à-dire qui intègre le web 2.0, un choix assumé d’investir dans la solution Macintosh, des élèves équipés, des élèves brillants, des profs qui ont les compétences numériques pour intégrer ce « background » technologique. Un monde idéal me direz vous ?

Tout le monde le sait l’enfer est pavé de bonnes intentions.

 

Cette école (intégrée dans un groupe d’autres d’écoles) est un bel exemple d’une vision marketing de l’éducation, il faut que ce soit avant tout rentable … Pour cela le directeur pratique un management de choc. Pas de place pour les hésitants, les sceptiques, les débutants. Il faut s’insérer dans le moule et avoir les compétences requises, c’est à prendre ou à laisser. Le rôle de la direction, aux dires de son dirigeant, est fondamentale. Tout est décidé par le haut, peu de place à la concertation.

En terme de performance, de qualité cette école est dans le haut de classement, les normes sont respectées.

 

Il me vient à l’esprit  cette petite histoire :

Une école veut tester les compétences de ses élèves. La question posée est la suivante : « comment sait-on que le printemps est arrivé ? La plupart des élèves répondent parce que la température augmente. Ils valident leurs compétences. Reste un élève, le poète du groupe probablement, qui répond « on recommence à entendre le chant des oiseaux et les fleurs poussent dans les champs » Que croyez qu’il advint de sa validation de compétences ? Le poète, le rêveur n’entre pas dans une démarche curriculaire parce que la compétence n’existe pas. L’inclassable pose un problème de norme …

 

J’ai plus eu le sentiment d’écouter une intervention dans une business conférence, que les paroles d’un pédagogue. Le directeur c’est le patron, les élèves une cible, les parents des clients (ou l’inverse). Un travail qui repose sur un business plan élaboré au cordeau, une limitation des risques. On ne prend que des bons élèves, les profs sont triés sur le volet, des parents ayant une propension marginale à épargner (le jargon économique est de circonstance).

 

Dans cette analyse des opportunités du marché, il est relativement aisé d’afficher de bons résultats puisque l’on a limité les facteurs de risque (la base du retour sur investissement ROI)

 

Bon vous l’aurez compris cette intervention m’a énervé et j’avais envie de l’écrire. Que l’on en déduise pas de cet exemple que les norvégiens sont exemplaires à partir de l’exemple d’une école. C’est plutôt la validité d’un modèle économique dont il était question.

 

Restons dans le cadre des systèmes de formation nordiques, prenons l’exemple du lycée d’Orestad (Danemark) qui me semble plus positif et qui repose sur une volonté étatique et dont le financement repose sur l’impôt – Voir ici un article sur ce lycée-

 

Alors pourquoi de la loi au contrat ? Mon esprit jacobin pense que la grandeur d’un système éducatif est de former l’ensemble des individus, commencer à trier c’est déjà renoncer. Montesquieu pour l’esprit des lois et le contenu de cet ouvrage éclairé.

Un billet de blog de Jean-Paul Moiraud sur le blog intitulé «un blogueur à Ludovia 2010»