L'estime de soi, un passeport pour la vie

L'estime de soi est le "carburant " des relations humaines.

Pour survivre dans un monde dominé par la concurrence, le profit, nous avons besoin de rester nous-mêmes. Outil indispensable à notre liberté et à notre autonomie psychique, l'estime de soi nous permet de résister aux pressions, aux manipulations pour nous affranchir de notre passé et ne pas être le jouet des influences sociales.

S'estimer, c'est d'abord se considérer comme digne d'estime avec ses forces, ses faiblesses, ses contradictions. Mais, c'est aussi s'interroger, évaluer ses capacités propres qui seules permettent de progresser, d'évoluer.

Malheureusement, notre école ne développe pas suffisamment l'estime de soi chez les élèves. Les pratiques pédagogiques, par leur caractère frontal, ont trop souvent tendance à installer nos jeunes dans une situation de passivité qui inhibe leur créativité et leur fait perdre progressivement toute confiance en eux-mêmes.

Ce n'est pas un hasard si l'écolier français, lors des évaluations internationales, souffre d'une incapacité à réutiliser ses connaissances pour aborder une situation nouvelle. Cette faiblesse, aggravée par un déficit de confiance, le conduit à ne prendre aucun ne risque; le signe le plus visible est le taux de non-réponse aux items proposés. Il choisit délibérément de ne pas répondre par crainte de se tromper.

Une enquête sur les résultats obtenus par nos adolescents dans des épreuves de mathématiques place les petits Français parmi les élèves les plus angoissés ; ainsi, plus de la moitié d'entre eux ont peur de proposer une solution lorsqu'il s'agit de résoudre un problème, soit sept fois plus que les Finlandais qui obtiennent les meilleurs résultats.

Non seulement, l'école ne prend pas en compte l'estime de soi mais des maladresses directement liées à un manque de formation des maîtres affaiblissent cette compétence au cours de la scolarité: regards désapprobateurs, remarques insidieuses, annotations moqueuses, appréciations vagues, humiliantes, réductrices. Quel gâchis pour une société qui veut promouvoir l'intelligence, la connaissance!

Le plus troublant est le rapport à l'erreur qui existe encore dans notre institution scolaire. Considérée comme une "faute" au sens chrétien du terme, elle conduit à la condamnation avec une connotation négative. Cette pédagogie enferme alors  l'élève dans une évaluation-sanction qui le démobilise et génère de la sous-estime.

L’erreur est pourtant inévitable, c'est même un passage obligé grâce auquel le savoir peut s'élaborer . Des attitudes différentes se manifestent; les enseignants ont tendance à conceptualiser les causes et les élèves à dramatiser les conséquences. Il convient donc de la travailler en classe, de la valoriser au travers de situations pédagogiques adéquates. Les professeurs devraient être  dans ce cadre," des pourvoyeurs d'occasions et non des donneurs de leçon". Alors que tout chercheur scientifique progresse à travers la rectification de ses erreurs, pourquoi a-t-elle encore un tel statut dans notre enseignement?

L'estime de soi constitue  le fondement  de tout projet éducatif.

En effet, l'enfant ne peut pas maîtriser ses compétences motrices, intellectuelles, sociales, s'il n'obtient pas de succès au cours de ses expériences.  C'est la base de la motivation et de tout processus d'apprentissage. Prendre conscience de sa valeur potentielle est un formidable "moteur" pour progresser;

Croire à l'importance de l'estime de soi, c'est aussi avoir confiance en l'Humain en ses capacités évolutives même dans les pires conditions.

L'estime de soi est le plus précieux héritage que nous pouvons laisser à nos enfants mais il n'est possible que grâce à des relations d'attachement et à des attitudes aimantes.

Celui qui "est  sécurisé physiquement et psychologiquement, qui ressent un sentiment de confiance face à la vie, qui se connaît et se confère une identité propre, qui ressent vivement un sentiment d'appartenance à sa famille et à un groupe, qui développe ses compétences  et prend conscience de sa valeur personnelle, hérite d'un trésor dans lequel il pourra puiser tout au long de son existence pour affronter les difficultés».

Cet héritage est le meilleur passeport qu'il puisse détenir pour s'épanouir pleinement et "faire œuvre de lui même".

Patrick Figeac

Proviseur honoraire,

bénévole à Radio4, Président d'une association intermédiaire par l'activité économique, auteur

Autre article de l'auteursur le blog : la pédagogie du détour 

 

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